Toutouyousuite
Baser sa stratégie de communication sur un site internet peut être dangereux. La campagne Toutouyoutour aurait pu tomber entre de mauvaises mains...
L'idée est simple et astucieuse, encore fallait-il l'avoir : détourner une campagne de marketing viral orchestrée à l'échelle nationale afin d'attirer les internautes vers un site personnel.
Historique des faits : le 2 novembre 2005, le marché français des renseignements téléphoniques s'est ouvert à la (nombreuse) concurrence.
L'ART (Autorité de Régulation des Télécommunications) interdisant toute promotion avant cette date, la société Le Numéro France décide d'utiliser le marketing viral pour faire parler d'elle... sans parler d'elle. (Pour plus de détails, consulter l'article consacré à cette campagne).
Mais les voies du marketing viral sont impénétrables. Une campagne de ce genre est un pari qui n'est jamais gagné d'avance et qui se déroule sur un territoire encore mal maîtrisé. En jouant les "apprenties sorcières", une agence de communication a engendré un phénomène nouveau que l'on pourrait baptiser le détournement viral.
Rappelons brièvement que le pivot d'une campagne de marketing viral est de susciter la curiosité du public, le désir d'en apprendre plus et d'en parler autour de soi (en bon français, on appelle cela le buzz).
Le marketing viral ne vend rien directement, aucun produit ni service n'est présenté. Le moteur est le public lui-même qui va essayer de glaner des informations. Dans le cas de la campagne Le Numéro France, les spots télévisés diffusés renvoyaient au site toutouyoutour.fr, qui loin d'éclairer l'internaute, entretenait le mystère... jusqu'au 2 novembre, bien sûr.
Et c'est là qu'intervient le détournement viral. L'agence de communication responsable de la campagne n'ayant déposé que les noms de domaines en .com et .fr, Dominik Fusina, concepteur de sites web, corrige cet oubli (malheureux ou volontaire) et crée son propre site toutouyoutour.net, en quatre jours seulement.
La confusion des extensions de noms de domaine (.com, .org, .net, etc...) n'est pas une chose nouvelle. Par exemple, contrairement à ce que vous pourriez penser, le site www.france2.com n'a strictement rien à voir avec la télévision publique française, qui s'est vu squatter son nom de domaine par un site peu recommandable...
Le site toutouyoutour.net, qui n'a lui aucune vocation commerciale, est plus subtil : il reprend l'identité visuelle, sonore et sémantique du "vrai" site. Quelques indices indiquent cependant qu'il s'agit d'une version parodique. Mais le résultat est là, l'internaute se croit à la bonne adresse (ou joue le jeu de la parodie), parcourt les pages et s'inscrit pour poster ses photos loufoques et participer à un concours.
Trois jours après l'ouverture de son site, Dominik indique avoir enregistré plus de 1000 vraies-fausses inscriptions, et au final détourné 15% du trafic vers son site.
Tout cela pour une mise de départ de 15 euros (dépôt du nom de domaine), une somme dérisoire comparée au coût probable de la "vraie" campagne. Dans le cas présent, c'est finalement Le Numéro France qui profite du buzz autour de ce site pastiche, directement et indirectement. Mais quid des campagnes marketing de demain ? Ce phénomène est-il appelé à se généraliser ? Et si, au lieu d'un internaute lambda, une société concurrente organisait une récupération virale dans le but de discréditer ou de s'approprier un marché ? Le viral contre le rival ? Dans le monde merveilleux du marketing viral où l'anonymat est roi, la vigilance de chacun doit rester la règle.
Sources :
- Toutouyoutour.net
- Article Toutouyoutour de Fusina.net
hoaxbuster
Rédacteur Hoax